mardi 16 juillet 2013

Libellules de carrière

J'ai re-visité le lac de carrière d'Aylmer Nord que j'avais exploré une première fois le  29 mai.
Carte de localisation du site (Google map).

Un endroit perturbé- c'est le moins qu'on puisse dire- et pourtant les libellules y volaient en grand nombre. L'espèce dominante était la magnifique Célithème indienne (Celithemis elisa), une espèce que je n'avais pas eu le bonheur de rencontrer avant ce jour. Elle semblait tout-à-fait à son aise ici, au son de la machinerie lourde.

J'ai également ramassé des dizaines d'exuvies sur la végétation émergente. Je ne serais pas surprise qu'il s'agisse de la Célithème. Je manque de temps pour faire une identification sérieuse. La saison des libellules bat son plein et je ne fournis pas à la tâche! Tous ces pots d'exuvies sauront bien occuper mes soirées d'hiver.

Lac de carrière. Derrière les tas de sable on aperçoit le parc de la Gatineau.


Une exuvie à identifier. J'en ai ramassé des dizaines comme celle-ci. Peut-être la Célithème indienne (Celithemis elisa)?


Célithème indienne (Celithemis elisa), dominante sur le lac. Elles pondaient en tandem à bonne distance du rivage.


Célithème indienne (Celithemis elisa) en accouplement dans le haut d'un arbre.


Ce prédateur pourchassait les Célithèmes. J'en ai vu quelques uns s'attaquer à celles qui pondaient à distance de la berge. Sans succès (cette fois-ci).

Il s'agit du Gomphe épineux (Dromogomphus spinosus). 


Un nouveau Sympétrum en émergence ici: Le Sympétrum tardif (Sympetrum vicinum).


L'Agrion des scirpes (Enallagma carunculatum)


L'Argie violacée (Argia fumipennis)

La déesse paisible (Nehalennia irene). 

J'ai également vu d'autres espèces que je n'ai pas photographiées: la Gracieuse (Libellula pulchella), la Lydienne (Plathemis lydia), l'Érythème des étangs (Erythemis simplicicollis), l'Agrion exilé (Enallagma exsulans) et l'Agrion vertical (Ischnura verticalis). Un total de 11 espèces d'Odonates pour aujourd'hui, une brochette surprenante pour un endroit comme celui-là (et je suis sûre d'en avoir raté quelques unes).


Je dédie ce billet à la mémoire de Bob Bracken. C'est avec tristesse que j'ai appris que ce grand naturaliste d'Ottawa nous avait quitté, le 14 juillet dernier. He will be missed by odonatologists and other naturalists on both sides of the Ottawa river.


dimanche 14 juillet 2013

Bioblitz au ruisseau de la Brasserie

Du 12 au 13 juillet avait lieu un Bioblitz organisé par les 'Ottawa riverkeepers' et les Amis du ruisseau de la Brasserie. C'était l'occasion de réunir les naturalistes du coin pour identifier un maximum d'espèces vivantes dans ce ruisseau urbain trop peu mis en valeur. J'y suis donc allée le 12 juillet de midi à 16h. Voir la carte du site exploré. J'ai rencontré des gens passionnés de la nature et plein de libellules. Quel après-midi fantastique!

Liste provisoire des espèces que j'ai vues le 12 juillet p.m. (incluant les adultes en vol et les exuvies seulement; je n'ai pas cherché de larves):

Caloptéryx bistrée (Calopteryx maculata)
Leste flamboyant (Lestes eurinus)
Leste tardif (Lestes congener)
Leste inégal (Lestes inaequalis)
Leste élancé (Lestes rectangularis)
Leste matinal (Lestes vigilax)?
Agrion vertical (Ischnura verticalis)
Déesse paisible (Nehalennia irene)
Agrion exilé (Enallagma exsulans)
Agrion enivré (Enallagma ebrium)
Agrion vespéral (Enallagma vesperum)
Agrion des scirpes (Enallagma carunculatum)
Agrion orangé (Enallagma signatum)
Agrion arc-en-ciel (Enallagma antennatum)
Argie violacée (Argia fumipennis violacea)
Argie svelte (Argia moesta)
Anax précoce (Anax junius)
Épithèque princière (Epitheca princeps)
La Gracieuse (Libellula pulchella)
La Lydienne (Plathemis lydia)
La Mélancolique (Libellula luctuosa)
Sympétrum semi-ambré (Sympetrum semicinctum)
Sympétrum éclaireur (Sympetrum obtrusum)
Érythème des étangs (Erythemis simplicicollis)
Pachydiplax (Pachydiplax longipennis)
Périthème délicate (Perithemis tenera)


Argie violacée (Argia fumipennis violacea)

Argie svelte (Argia moesta)

Sympétrum semi-ambré (Sympetrum semicinctum) immature

Sympétrum éclaireur (Sympetrum obtrusum) parasité par de nombreux acariens (mites d'eau).


Leste flamboyant (Lestes eurinus) femelle. "AHHHHH!" dit-elle.


Leste flamboyant (Lestes eurinus) mâle.
Leste inégal (Lestes inaequalis)

Leste tardif (Lestes congener)?




Pachydiplax (Pachydiplax longipennis) immature tout frais émergé.

Pachydiplax (Pachydiplax longipennis) mâle mature.

Périthème délicate (Perithemis tenera)


Érythème des étangs (Erythemis simplicicollis), immature tout frais émergé.

Fait notable, j'ai ramassé plusieurs exuvies qui appartienne, du moins je le crois avec mes connaissances de néophyte, à la libellule Pachydiplax (Pachydiplax longipennis) et à la Périthème délicate (Perithemis tenera). À ma connaissance, ce pourrait-être la première preuve directe que ces 2 espèces d'introduction récente au Québec peuvent compléter tout leur cycle de vie chez nous. Je compte faire valider cette observation par nos 2 spécialistes en exuvies d'Odonates (Taymond Hutchinson et Benoit Ménard).

Exuvies de Perithemis tenera?
Exuvies de Pachydiplax longipennis? et Lestes vigilax?




En terminant, quelques photo de ce ruisseau à la beauté rebelle:

Portion de ruisseau au cours lent




Sous l'autoroute.

Portion d'eaux vives

À côté des graffiteurs dansent les Pachydiplax, Périthèmes délicates et Lestes de toutes sortes.

Portion marécageuse en s'approchant de l'embouchure de la sortie du ruisseau.


Je remercie les organisateurs de ce bel événement. Bravo! J'ai hâte de voir le bilan final de toutes les espèces observées au cours de ce Bioblitz de 24 heures.

Pour plus de renseignements:

vendredi 12 juillet 2013

Émergence massive de gomphes

Hier, des hordes de gomphes marqués (Stylurus notatus) sont sorties de la rivière des Outaouais. Les berges sont jonchées de leurs exuvies- hier soir j'ai ramassé 183 exuvies en 40 minutes; j'aurais pu en ramasser plus.

Durant toute la journée, on pouvait voir des émergences. Celui que j'ai photographié ici a émergé entre 19h et 21h, plutôt tard selon moi, mais il n'était pas le seul car j'ai vu un autre individu ténéral prendre son envol au crépuscule.

Le Lac Deschênes est un élargissement de la rivière des Outaouais juste en amont des rapides Deschênes, à Aymer (Gatineau, Québec). Il est 19h25.


Tout de suite en arrivant, j'ai trouvé un Gomphe marqué (Stylurus notatus). Une femelle éclopée qui ne survivra pas.

2 Gomphes fraternels (Gomphus fraternus) se sont chamaillé dans les derniers rayons de soleil, puis se sont envolés dans le haut des arbres, probablement pour y passer la nuit.

Plus loin sur la plage, parmi les débris de crue quelques mètre en haut de la ligne d'eau actuelle, un Gomphe marqué (Stylurus notatus) en émergence. Il est 19h50.


19h54

19h55

20h

20h06


20h13


20h20

20h27. Il commence à faire sombre. La température baisse en dessous de 20 degrés celsius. Allez, grouille-toi...


20h32

20h35

20h36. Test des moteurs: tout semble en ordre.

De 20h39 à 20h42, le gomphe a "chauffé ses moteurs". Je présume qu'en raison de la basse température, il avait besoin de générer un peu de chaleur pour pouvoir décoller.



20h43, décollage réussi.

On me nomme "Elusive clubtail". Adieu, vous ne me verrez plus. Au large de la rivière je chasserai, au sommet des arbres je me reposerai, en compagnie de milliers d'autres libellules aussi fantomatiques que moi...


jeudi 11 juillet 2013

Sur les traces du père Stöhr

Hier, j'ai fait une petite visite à la deuxième grande rivière de la ville: la rivière Gatineau. Cette rivière rejoint la rivière des Outaouais en plein coeur de la ville de Gatineau. J'ai exploré un segment de berge d'environ 500m en amont du point indiqué sur la carte (45°29'35.06"N; 75°45'28.31"O).


Cet endroit revêt une importance particulière dans l'histoire de l'odontologie québécoise puisqu'il a été visité par L. M. Stöhr dans le cadre de l'une des première études ayant été conduite sur les libellules du Québec, en 1918.

Le père Stöhr était professeur au collège Saint-Alexandre, sis au bord de la rivière Gatineau tout près de l'endroit que j'ai inventorié hier. Il était un amateur et considérait que sa liste de 54 libellules trouvées dans un rayon d'un mille autour du collège n'était pas complète: "Sans aucun doute cette liste présentera bien des lacunes; car la vie astreignante de professeur ne fournit pas les loisirs nécessaires pour collectionner en toute saison et à n'importe quel temps de la journée." Il est néanmoins super intéressant de comparer ce que l'on trouve en 2013 avec ce qu'il a trouvé presque 100 ans auparavant, alors que ce coin de pays alors appelé "Ironside" était fort peu urbanisé.


Rivière Gatineau, en regardant en aval. J'imagine le père Stöhr, avec sa longue soutane noire et son filet à libellules...

Rivière Gatineau, en regardant en amont. On voit au fond la centrale hydroélectrique des Rapides Farmer (Hydro Québec).
J'ai exploré la rive entre 9h00 et 11h00. Le temps était à l'orage. Je ne m'attendais pas à voir de libellules en vol étant donné la météo (et d'ailleurs je n'en ai pas vu), mais je tenais à y aller ce matin pour récolter un maximum d'exuvies avant que la pluie ne les emporte. J'ai donc concentré toute mon attention sur les pierres, brins d'herbes, arbres, arbustes et débris de crues. J'ai trouvé: 4 Hagénies (Hagenius brevistylus); 3 Gomphes épineux (Dromogomphus spinosus); 1 Gomphe marqué (Stylurus notatus); 1 Aeschne vineuse (Boyeria vinosa).

Trouvé en 2 heures de collecte à la rivière Gatineau.


...Trouvé la veille  en 2 heures de collecte dans la rivière des Outaouais (marina d'Aylmer).

Première observation: la quantité d'exuvies trouvées ici est bien moindre que dans la plupart des sites que j'ai visité le long de la rivière des Outaouais. Je ne tirerais cependant pas de conclusion quand à l'abondance réelle des libellules. Il est fort probable qu'ici, les berges étant plus escarpées, le courant plus fort et plus irrégulier en raison du barrage hydroélectrique immédiatement en amont, les exuvies soient régulièrement "lavées". Il faudrait idéalement visiter ce site très régulièrement pour avoir une meilleure idée de l'abondance et surtout de la richesse des espèces présentes ici.

Deuxième observation: des 4 espèces trouvées, 2 n'étaient pas sur la liste du père Stöhr, soit le Gomphe marqué (Stylurus notatus) et l'Aeschne vineuse (Boyeria vinosa). Pour ce qui est du Gomphe marqué, ce n'est pas surprenant s'il n'a que collectionné les adultes en vol. En effet, il est notoire que le Gomphe marqué est presqu'impossible à voir en vol en raison de ses habitudes de vie fort discrètes, d'où son nom anglais d'"Elusive Clubtail".

Troisième observation: Il y a plusieurs espèces que je m'attendais à voir et que je n'ai pas vues. Entre autres la Cordulie de Provencher (Neurocordulia yamaskanensis), dont j'ai trouvé les exuvies en abondance la semaine dernière près des rapides de la rivière des Outaouais. Leur temps est peut-être passé? Les exuvies ont peut-être déjà été lavées? Ou peut-être y-a-t-il un autre odonatologiste qui est passé avant moi?

 Je conclus en me disant, comme toujours, qu'il faudrait revenir ici plus souvent...


Source:

STÖHR, L.M., 1918. Les Odonates des environs de Saint-Alexandre, Ironside, P.Q. Le Naturaliste canadien 45: 81-85.)

Cet article est rendu disponible par la Biodiversity Heritage Library.